La plupart des plus anciens villages des Cantons-de-l'Est doivent leur naissance à la présence d'un moulin. Rappelons-nous, entre autres Sherbrooke (Hyatt's Mills), Cowansville (Ruiter's Mills) et Rock Island (Kilborn's Mills). D'autres hameaux tels que Denison's Mills, Way's Mills et Kinnear's Mills tirent même leur nom de propriétaires de moulins. Des moulins à grains, à scie et à laine furent construits le long de rivières et ruisseaux, partout où le courant de l'eau était suffisant pour entraîner une roue hydraulique. Ces moulins étaient essentiels à la survie et le meunier, un homme important dans tout village.
Moulins à grains
Certains des plus anciens moulins (comme celui à gauche à Stanbridge East) survivant dans les Cantons sont des moulins grains où les céréales étaient moulues. Avant l'introduction des moulins, les pionniers moulaient leurs céréales à la main. Ça prenait du temps, manquait d'efficacité et ne produisait qu'un gruau ou un pain remplis de grumeaux.
L'arrivée du moulin à grains représente tout un progrès. La plupart de ces édifices furent bâtis le long de ruisseaux d'où l'on pouvait construire des barrages afin de régulariser le débit hydraulique ou près d'une chute où le courant de l'eau pouvait actionner une roue à aubes reliée à une paire de meules par un système d'engrenages et d'axes. Les céréales étaient placées entre les deux meules, broyées et moulues en farine. La roue hydraulique constituait une source d'énergie simple et économique. L'un des premiers moulins à grains dans les Cantons fut construit par Nicholas Austin en 1793 à l'embouchure du lac Memphrémagog.
Moulins à scie
Un moulin à scie s'avérait souvent le deuxième moulin construit dans un hameau. Avant son introduction, les pionniers construisaient leur habitation en billots et en planches équarries à la hache. Mais après l'introduction des moulins à scie, les madriers et planches sciées au moulin se trouvèrent en grande demande. Vers 1830, on comptait plus de trente de ces moulins dans le seul comté de Sherbrooke.
Moulins à carder
Les moutons constituaient un élément essentiel à la vie des pionniers. Leurs toisons servaient à produire la laine. Tondues à chaque printemps, les toisons de laine étaient lavées pour les débarrasser de leur gras naturel et des souillures, puis peignées et enfin cardées afin de démêler les fibres. Procéder manuellement prenait beaucoup de temps.
Comme les troupeaux de moutons se multiplièrent sur les fermes et puisqu'une vague d'immigration d'Écossais dans la région au milieu du 19e siècle marqua l'augmentation du nombre de fermes d'élevage d'ovins, on construisit des moulins à laine ou à carder, afin de répondre à la demande croissante. Avec l'arrivée de ces moulins, les pionniers pouvaient alors apporter leurs toisons pour les faire transformer, carder et rouler en ballots, puis ramener ces derniers à la maison pour les filer au rouet ou les tisser sur les métiers. Les moulins à carder forment les précurseurs des grandes manufactures de textile industrielles que l'on rencontre encore dans plusieurs villes et cités, à l'exemple de la Paton Manufacturing Company à Sherbrooke, qui, à son époque, représentait la plus grande usine textile au Canada.
Aujourd'hui, un très petit nombre de moulins de l'époque des pionniers subsistent dans les Cantons. Des centaines ont disparu du paysage au cours du siècle dernier. En certains endroits, on trouve encore leurs traces (comme celui à gauche à Massawippi). Ceux qui ont réussi à survivre constituent un volet de notre patrimoine bâti très important.