Abbaye Saint-Benoît-du-Lac

Author:
Matthew Farfan

medium_st.benoit.exterior.jpg"Dans une civilisation de plus en plus mobile, bruyante et à la voix sonore, les zones de silence deviennent une nécessité vitale. Plus que jamais, les monastères sont appelés à demeurer des lieux de prédilection de paix et d'intériorité. Ne laissez jamais les pressions internes ou externes porter atteinte à vos traditions et vos moyens de recueillement. Efforcez-vous plutôt d'éduquer vos hôtes et vos retraitants à la vertu du silence. Aimez votre séparation du monde tout à fait comparable au désert biblique. Paradoxalement, ce désert n'est pas le vide. C'est là que le Seigneur parle à votre cœur et vous associe étroitement à son œuvre de Sauveur."
Pape Jean-Paul II, 1980

Un édifice imposant domine la rive ouest du lac Memphrémagog près du village d'Austin, le monastère bénédictin de Saint-Benoît-du-Lac. Visible de l'autre côté du lac, l'abbaye de Saint-Benoît rappelle un château français. Avec ses tourelles, son toit de cuivre verdi et ses murs en pierre, elle se dresse de manière impressionnante au-dessus des vertes collines qui ondulent doucement vers le lac. Le mont Owl's Head se dessine majestueusement au loin. Les moines n'auraient pu choisir un emplacement plus saisissant!

medium_st.benoit.owlshead.view_.2.jpgPERSÉVÉRANCE
L'histoire de Saint-Benoît-du-Lac repose sur la persévérance. Le monastère date de 1912 alors qu'une poignée de moines français exilés arrivèrent au Canada en provenance de la Belgique. Leur abbé fondateur, Dom Paul Vannier, avait trouvé un endroit magnifique dans les Cantons-de-l'Est. Avec la bénédiction de l'évêque de Sherbrooke, il acheta une vieille ferme sur les bords du lac Memphrémagog. Curieusement, l'endroit élu se trouvait sur le site même choisi par le pionnier Quaker du Canton de Bolton, Nicholas Austin, 120 ans auparavant. Les grands hommes se ressemblent!

Au cours des premières années, la minuscule communauté monastique rencontra beaucoup de difficultés. La pauvreté, l'isolement et le dur labeur sapa ses forces à plus d'une reprise. Et pour aggraver encore la situation, Dom Vannier se noya lors un accident de bateau. À un moment donné, le monastère (une modeste "cella") qui occupait une simple maison de ferme fut menacé de fermeture. Lorsque deux moines canadiens se rendirent en Europe pour demander du support, le groupe reçut un répit.

medium_st.benoit.bolduc.church.interior.jpgDans les années qui suivirent, la situation s'améliora et la communauté commença à croître. En 1935, Saint-Benoît reçut le statut de monastère autonome. À cette époque, Saint-Benoît était devenu un simple édifice en bois de trois étages; en 1938, les moines décidèrent de construire un monastère plus solide et plus imposant. Ils s'adjoignirent l'aide d'un architecte français bénédictin, Dom Paul Bellot. Le nouveau monastère fut inauguré en 1941. En 1952, Saint-Benoît devint une abbaye. Depuis, plusieurs annexes se sont greffées au monastère, entre autres une hôtellerie pour les visiteurs; suivit en 1994, une magnifique nouvelle église.

QUIÉTUDE
Aujourd'hui, Saint-Benoît-du-Lac est reconnue non seulement pour son architecture impressionnante et son environnement spectaculaire, mais aussi comme un lieu de répit pour les pèlerins de partout dans le monde. Les visiteurs peuvent s'y rendre pour la journée ou, avec une réservation, y passer la nuit dans une des deux hôtelleries de l'abbaye, qui peuvent accueillir jusqu'à 50 hommes et 15 femmes. Réflexion, prière et quiétude y sont la règle.

medium_st.benoit.bolduc.langlois.1.jpgTOURISME
Saint-Benoît constitue un site touristique majeur; il attire entre 100 000 et 200 000 visiteurs par année, selon Dom Jacques Bolduc. Dom Bolduc, Père cellérier, est responsable des questions administratives. Il déclare que l'abbaye constitue un attrait énorme pour l'industrie touristique dans la région. Il évalue 1 000 à 2 000 par semaine le nombre de personnes qui visitent l'endroit en haute saison estivale. Certaines personnes demeurent dans les hôtelleries, dit-il, mais plusieurs viennent seulement pour assister aux messes qui sont célébrées à 11 h tous les jours et chantées en grégorien dans l'église, qui compte 500 places habituellement toutes occupées les dimanches. D'autres visiteurs viennent goûter le fameux fromage Saint-Benoît, fait par les moines à l'abbaye même. D'autres viennent pour le cidre de pommes, tiré des pommes cueillies dans les vergers monastiques. Une boutique offre fièrement toute une gamme de produits ainsi que des enregistrements musicaux, des livres et des articles religieux.

Par miracle, l'abbaye réussit à préserver sa vocation première de méditation et de prière, tout en accueillant beaucoup de gens. Cela vient en partie du fait que certains secteurs sont ouverts au public alors que d'autres sont strictement inaccessibles. La population de Saint-Benoît-du-Lac varie entre cinquante et soixante citoyens selon le nombre d'aspirants en cours de noviciat. Les moines partagent leur temps entre leurs devoirs religieux et leurs tâches agricoles, explique Dom Bolduc.

medium_st.benoit.1913.jpgMUNICIPALITÉ PARTICULIÈRE
Saint-Benoît-du-Lac présente une particularité curieuse. L'abbaye ainsi que ses 225 ha. (560 acres) de terre constitue une entité municipale par elle-même, une sorte de Cité du Vatican en miniature. "En effet, c'est exact," s'exclame en riant un représentant de la Fédération québécoise des municipalités (FQM). "C'est certainement la seule que nous connaissons dans la province!"

Sculptée dans la municipalité d'Austin en 1939, Saint-Benoît fut créée en partie parce qu'Austin, également sculptée dans Bolton-Est l'année précédente, craignait devoir fournir les services habituels (eau, électricité, etc.) aux moines qui, légalement, n'étaient pas tenus de payer de taxes municipales. Les gens d'Austin et les moines s'entendirent que ce serait dans le meilleur intérêt de tous que le monastère forme sa propre municipalité. Dom Bolduc rapporte que ce genre de situation était rare au Québec à cette époque mais non inconnu. Il existait bien d'autres institutions qui constituaient un municipalité dont un hôpital à Québec.

medium_st.benoit.tower_.2.jpgAujourd'hui, Saint-Benoît conserve encore son autonomie. Dom Bolduc remplit le rôle de maire-suppléant et assiste régulièrement aux réunions de la MRC Memphrémagog. Cependant, Saint-Benoît renonce à l'organisation municipale traditionnelle et est administrée par une corporation composée de moines bénédictins.

Quand on lui demande si les moines s'inquiètent des fusions municipales forcées par le gouvernement, Dom Bolduc explique que, depuis sa création, la petite enclave a rarement, si jamais demandé, quoi que ce soit à la province. "En 1958, nous avons été les premiers à construire une usine de traitement des eaux. Nous avons procédé ainsi car, à cause de notre fromagerie, nous ne voulions pas causer de la pollution. Non, nous ne sommes pas inquiets. Nous ne demandons rien, alors on nous laisse tranquilles," lance-t-il.

Pour tout renseignement, les visiteurs peuvent consulter le site Web de l'Abbaye Saint-Benoît-du-Lac à http://www.st-benoit-du-lac.com.