Les Rébellions, première partie : contexte politique

Author:
Matthew Farfan

medium_rebellions.2.jpgRÉBELLIONS DE 1837-1838
En 1837 et 1838, le Haut-Canada et le Bas-Canada furent ébranlés par d'immenses bouleversements sociaux et politiques, appelés les Rébellions, qui ont été ressentis plus profondément au Bas-Canada (Québec), où Louis-Joseph Papineau et son parti Patriote dominaient l'Assemblée législative et le mouvement pour la réforme politique. Les Patriotes, composés en grande partie - mais pas entièrement - de Canadiens français, se sont trouvés de plus en plus en opposition au leadership conservateur canadien-anglais et britannique de la province.

LES CANTONS
Les affrontements violents, le long de la rivière Richelieu, à Saint-Eustache et ailleurs, ont déjà été largement racontés. Ce qui nous intéresse ici, c'est que tant le mouvement des réformes que les insurrections subséquentes comportaient des éléments particuliers aux Cantons-de-l'Est.

Dans le milieu des années 1830, les comtés limitrophes de Missisquoi et Stanstead envoyèrent chacun des réformateurs à l'Assemblée à Québec. Mais en 1837, lorsque les membres les plus radicaux du mouvement réformiste de la province se tournèrent vers la révolte ouverte, l'ensemble du mouvement - incluant ses membres plus modérés - se trouva impliqué.

D'ORIGINE AMÉRICAINE
Un certain nombre de membres de l'Assemblée provenant des Cantons-de-l'Est venaient originellement des États-Unis. Ceci n'est pas surprenant puisqu'à cette époque, une bonne partie de la région était peuplée de gens d'origine ou de descendance américaine. Nonobstant le mythe populaire selon lequel les Cantons étaient peuplés de Loyalistes fidèles à la monarchie britannique, les liens avec les États-Unis étaient puissants; plusieurs nouveaux immigrants ou leurs enfants penchaient en fait les idéaux du côté des démocratiques de la Révolution américaine.

medium_rebellions.1.jpgLES DROITS DE LA PERSONNE
Membre de l'Assemblée pour le comté de Stanstead, Marcus Child, né au Massachusetts, prit ouvertement parti pour Papineau. À l'Assemblée, M. Child vota en faveur des fameuses 92 Résolutions de Papineau, lesquelles énuméraient toutes les demandes du parti et ses revendications contre le gouvernement. M. Child se déclara "fervent supporteur de la Charte des droits de la personne."(1) Puissantes déclarations dans une province qui se trouvait encore bien loin de la démocratie, mais qui semblèrent séduire paysans et commerçants des Cantons.

Durant cette période, plusieurs journaux réformistes étaient publiés dans les Cantons. À Stanbridge East, des troupes du gouvernement auraient balancé les presses du Missisquoi Post dans la rivière Pike. Le St. Francis Courier, imprimé à Sherbrooke, faisait partie également des journaux de cette veine. Durant les insurrections, le Canadian Patriot (Stanstead), journal de grand format particulièrement radical, était en fait mis sous presse de l'autre côté de la frontière, en sécurité, à Derby Line au Vermont. Son éditeur, écrivait l'historien des Cantons, B. F. Hubbard, se vouait à attiser le sentiment révolutionnaire chez les gens.(2)

RÉFORMATEURS ET CONSTITUTIONNELS
Des associations de réformateurs se formèrent dans plusieurs cantons; les discours prononcés lors de ces réunions étaient rapportés dans les journaux locaux et montréalais au cours des années qui ont mené au premier éclatement des insurrections en novembre 1837. Dans les Cantons-de-l'Est, les gens devenaient très fortement politisés.

Les associations dites loyales ou constitutionnels comptaient aussi des adhérents dans la région. Plusieurs leaders respectés, hommes d'affaires influents et politiciens se trouvaient dans ce camp, parmi lesquels Joseph Walton, l'éditeur au franc parler du journal sherbrookois, Farmers' Advocate and Townships Gazette. Certains résidents des Cantons démontraient leur loyauté en servant dans la milice locale qui finalement contribua à maintenir l'ordre dans les Cantons pendant et après les insurrections.

(Voir : Les Rébellions, deuxième partie : les Hunters' Lodges et la réaction loyale)

Références :
1) Matthew Farfan, The Stanstead Region, 1792-1844, Ottawa, 1992, 48.
2) B. F. Hubbard, Forests and Clearings, Montréal, 1874, pp. 12-16.