Canaux militaires de la rivière des Outaouais

Author:
Matthew Farfan

Trois canaux, Carillon, Chute-à-Blondeau et Grenville furent construits sur la rive nord de la rivière des Outaouais entre 1829 et 1833. Contournant les bouillonnants rapides du Long-Sault hauts de 21 km (13 miles), leur conception date des années suivant la Guerre de 1812. À cette époque, on considérait le Saint-Laurent vulnérable et il pouvait devenir la cible d’attaquants venus des États-Unis. Les canaux sur la rivière des Outaouais allaient offrir une voie navigable en direction de Kingston, alternative à celle du fleuve.

Image retirée.CANAUX MILITAIRES
Achevés en 1832, les canaux ainsi que celui de Rideau avaient une fonction militaire. Pour cette raison, leur fonction première consistait à transporter les troupes et le ravitaillement en cas de nouveau conflit armé avec les Américains. Tout comme le canal Rideau, les trois canaux de la rivière des Outaouais furent érigés par les Royal Engineers rétribués par la Couronne Britannique.

Le canal Carillon, dans le village de Carillon (qui fait maintenant partie de Saint-André-d’Argenteuil), se situait le plus au sud de la rivière des Outaouais. Construit entre 1826 et 1833, il comprenait trois écluses et un canal principal long de 3,2 km (2 miles). Les eaux l’alimentant provenaient de la rivière du Nord, un petit affluent de la rivière des Outaouais.

Les travaux du canal Grenville, à 21 km (13 miles) en amont de Carillon, commencèrent en 1819 pour s’achever en 1833. Élargi entre 1871 et 1882, il possédait sept écluses et mesurait 9,5 km (6 miles) de long.

Le canal Chute-à-Blondeau, à 6,5 km (4 miles) en amont de celui de Carillon, était le plus petit des trois. Long de 0,4 km (¼ de mile), il fut creusé dans les rochers, ne nécessitant ainsi aucune pierre de taille, sauf là où on installera l’écluse. Ce canal fut abandonné après la construction du barrage de Carillon au 19ème siècle. Suite à la construction de la centrale hydroélectrique, en 1963, il sera alors submergé.

Image retirée.ROUTE COMMERCIALE
Dès le départ et après leur transfert au gouvernement du Canada dans les années 1857, les canaux Carillon, Chute-à-Blondeau et Grenville servirent plus à des fins commerciales que militaires. De fait, les menaces d’un conflit s’estompant et le commerce le long de la rivière des Outaouais prenant de l’ampleur, l’importance commerciale de ces canaux devint de plus en plus évidente. En peu de temps, ils devinrent des lieux vitaux sur la route entre Montréal, Bytown (Ottawa) et Kingston.

UN LONG PÉRIPLE
L’un des défauts majeurs dans la conception des canaux, leur faible tirant et les dimensions restreintes des écluses, faisait que les larges vaisseaux ne pouvaient les emprunter, comme on le faisait au canal Rideau. Ainsi, pendant de nombreuses années, les passagers à bord des gros bateaux à vapeur naviguant entre Montréal et Ottawa devaient débarquer à Carillon, emprunter les sentiers de portage (plus tard, réseau ferroviaire) en direction de Grenville puis remonter à bord d’un second vapeur pour la dernière partie du voyage en direction d’Ottawa. La même chose se déroulait sur le chemin du retour. Ces obstacles augmentaient clairement la durée du trajet.

Image retirée.AMÉLIORATIONS
Pour répondre aux besoins croissants de la navigation et suite au développement rapide du commerce du bois et celui de la pâte à papier, les canaux se verront notablement élargis entre 1873 et 1882. Amélioré, le système comprendra alors un barrage, deux canaux et sept écluses. Le canal Chute-à-Blondeau et ses écluses tombèrent en désuétude. Toutefois, malgré ces perfectionnements, les gros vapeurs transportant les passagers demeuraient trop larges pour les canaux.

NAVIGATION DE PLAISANCE
L’expansion du réseau de chemin de fer durant la deuxième moitié du 19ème siècle, plus particulièrement la création de routes directes entre Montréal-Kingston et Montréal-Ottawa, marquèrent le long déclin des canaux commerciaux et des voies de navigation pour les passagers. Avec le temps, cependant, la navigation de plaisance fort prisée marquera le changement complet de la vocation des canaux militaires qui deviendront des attractions touristiques.

BARRAGE HYDROÉLECTRIQUE
Entre 1959 et 1963, on procède à la construction d’un barrage, d’une centrale hydroélectrique et d’une écluse à la fine pointe de la technologie près des rapides de Carillon. Le niveau de la rivière des Outaouais s’élèvera drastiquement, submergeant l’ancien canal. Toutefois, la nouvelle écluse permettait aux bateaux de franchir en une fois une dénivellation qui, autrefois, nécessitait un système comprenant trois canaux et onze écluses. Dorénavant, l’écluse de Carillon élève et abaisse les embarcations de 19 mètres (62 pieds) en seulement 30 minutes. La centrale hydroélectrique est la quinzième plus grande installation d’Hydro-Québec. L’écluse et le parc voisin appartiennent à Parcs Canada.

Image retirée.LIEU HISTORIQUE NATIONAL
De nos jours, Parcs Canada gère le lieu historique national du Canal-de-Carillon. Destination estivale populaire, il attire annuellement 20 000 plaisanciers qui empruntent l’écluse moderne permettant de remonter ou descendre la rivière des Outaouais et 30 000 personnes venant visiter le parc.

Le parc contient les vestiges de l’ancien canal et ceux de l’écluse No 1 (1830-1833), la maison et magasin du percepteur (1843), la demeure du superintendant (1843), et la jetée du deuxième canal (1873-1882). Des panneaux d’interprétation et des expositions saisonnières dans la maison du percepteur aident à comprendre l’histoire passionnante de ce lieu. À proximité du canal se trouve «La Caserne» de Carillon (v. 1830), qui abrite aujourd’hui le Musée Régional d’Argenteuil.

Le canal de Carillon et celui de Grenville ont été désignés lieux historiques nationaux par le gouvernement du Canada en 1929. «La Caserne» de Carillon (Musée Régional d’Argenteuil) les a rejoints en 1960.

Références :
Hydro-Québec, La centrale de Carillon.
Parcs Canada, publications diverses.
Robert Legget, Ottawa River Canals and the Defence of British North America, 1988.