Circuit patrimonial : Matapédia-Restigouche

Author:
Dwane Wilkin

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Sous l’éclat des canons et le feu des fusils, les eaux de la rivière Ristigouche sont devenues le théâtre enflammé d’une bataille décisive.

Au cours de l’été 1760, les aléas de la guerre avaient tourné en faveur de l’Angleterre. Les forces françaises, défaites à Québec, attendaient désespérément après des renforts. Tous les espoirs reposaient sur un petit convoi de bateaux de ravitaillement, qui était alors assailli dans le bassin de la Ristigouche.

Depuis l’époque préhistorique, les Micmacs avaient parcouru les territoires entre l’eau des marées de la baie des Chaleurs et le Saint-Laurent, le long des sentiers qui suivent la vallée de la rivière Matapédia. Pour protéger cette route vitale, la France avait construit un fort sur les rives de la Ristigouche, juste à l’ouest de Pointe-à-la-Croix. Alors que les navires de guerre britanniques s’avançaient avec précaution en amont dans sa direction, le commandant du convoi voué à la ruine saborda ses vaisseaux afin de bloquer le chenal. De nos jours, le lieu historique national du Canada de la Bataille-de-la-Ristigouche présente des objets provenant de la frégate française submergée, Le Machault.

Restigouche MapLa chute de la Nouvelle-France marqua le début d’une nouvelle ère pour la Gaspésie. Ses ressources en poisson, en bois et en fourrure attirèrent les commerçants d’origine écossaise George Walker et Hugh Baillie à la rivière Ristigouche en 1768; les marchands anglais John et Henry Shoolbred ne tardèrent pas à les suivre. Puis, à la suite de la Révolution américaine, de nombreux Loyalistes de la Nouvelle-Angleterre se dirigèrent vers le nord depuis la baie de Fundy, le long de la rivière Saint-Jean et défrichèrent les terres. Des vagues de fermiers irlandais, acadiens et anglais les rejoignirent ensuite.

Des descendants de ces premiers colons québécois poursuivent toujours un mode de vie basé sur la pêche et l’exploitation forestière.

POUR S’Y RENDRE

Depuis Québec, suivre le Saint-Laurent en direction est sur l’autoroute 20 et la route 132, puis tourner vers le sud, à Mont-Joli. Ce circuit mène à des sites historiques et à des points d’intérêt situés dans les vallées de la Matapédia et de la Ristigouche, le long d’une section de la route 132, entre Causapscal et Miguasha à l’extrémité de la baie des Chaleurs.

LE SITE DE PÊCHE MATAMAJAW
Causapscal

Une halte sur l’historique chemin Kempt entre Métis et la Ristigouche, le confluent des rivières Causapscal (prononcé Coz-Opsicle par les anglophones de la région) et Matapédia était simplement appelé Les Fourches par les premiers voyageurs. C’était l’un des quelques postes dispersés sur la route, longue de 97 milles, qui fut d’abord ouverte en 1833. Ici, s’étend un village de pêche centenaire, transformé pour mettre en valeur l’histoire de la pêche au saumon de la vallée.

old_routhierville_train_station.jpgBien que de nos jours cette communauté soit entièrement francophone, l’un des premiers pionniers de Causapscal fut Jonathan Noble, un Loyaliste de la Nouvelle-Angleterre, qui arriva au Québec par le biais du Nouveau-Brunswick après le grand feu de Miramichi. On rapporte que celui-ci défricha des terres ici au début des années 1800 et fut par la suite un gardien du poste local. Sa ferme aurait été située à l’endroit où s’élève maintenant la superbe église catholique en pierre de style néogothique (1910).

Le club de pêche au saumon Matamajaw, qui fait partie d’un domaine privé établi vers 1870 par le financier montréalais et baron du chemin de fer Lord Mount Stephen, a appartenu pendant des décennies à un petit groupe de riches hommes d’affaires. En activité du début des années 1900 jusque dans les années 1960, le pavillon principal surplombe quelques-unes des meilleures rivières à saumon de l’Atlantique au Québec. De nos jours, une fosse spécialement aménagée permet aux touristes d’observer de près les jeunes poissons.

Méticuleusement conservé et meublé avec authenticité, le pavillon offre un aperçu de la grandeur surannée dans laquelle les hommes fortunés, disposant de domestiques et de wagons de chemin de fer privés, s’adonnaient à leur passion.

Site historique Matamajaw
53C, rue Saint-Jacques
(418) 756-5999

ROUTHIERVILLE

Un autre des premiers postes du chemin Kempt, ce charmant village où le train s’arrêtait sur demande était connu des premiers voyageurs sous son nom micmac, Assametquagan. Son nom actuel rend hommage à un ancien chef de gare, Alphonse Routhier.

Thomas Evans est considéré comme le premier colon d’Assametquagan, mais les origines modernes de ce hameau débutent avec le chemin de fer intercolonial, construit entre 1867 et 1876 pour relier les colonies des Maritimes au reste du Canada.

routhiervilleLa construction du chemin de fer a ouvert la vallée de la Matapédia à de nouveaux développements en y attirant des milliers de travailleurs. Le train a aussi rendu possible l’établissement de la pêche sportive au saumon de l’Atlantique, pour laquelle la région est si renommée. Une halte de repos située juste à la sortie de la route permet de découvrir la rivière et le pont couvert de Routhierville, long de 79 mètres, qui fut bâti en 1931. Remarquez la gare de bois de couleur rouge, construite en 1878, qui semble quelque peu abandonnée près de la voie ferrée.

MANN SETTLEMENT
Alors que les noms de plusieurs établissements des anciens cantons de Matapédia et de Ristigouche ont été changés ou oubliés – Sillarsville, Millstream et Rustico pour en nommer quelques-uns – celui de Mann Settlement rend toujours hommage à la mémoire d’un important clan de pionniers de la Gaspésie, descendants du colonel Edward Mann, un Loyaliste originaire du Massachusetts. Des générations de familles Irvine et Lyons ont vécu ici depuis les années 1880. L’église baptiste de Mann Settlement est un point de repère très connu situé à côté du cimetière des pionniers.

MATAPÉDIA

(population de 800 habitants)

Ce charmant village bilingue, situé au confluent des rivières Matapédia et Ristigouche, est renommé pour la pêche au saumon. Depuis des générations, les gens de la région ont gagné leur vie dans les luxueux camps de pêche en travaillant comme guides, cuisiniers, aides et gardiens. Le plus grand et le plus renommé d’entre eux, le club de pêche au saumon Ristigouche, est aussi le plus ancien club de pêche au Canada.

Établi en 1880, le camp principal du club (8, rue Perron Est) s’élève sur un terrain acheté d’un pionnier de Matapédia, Daniel Fraser, un marchand et commerçant originaire de la Nouvelle-Écosse qui, avec sa femme écossaise Jean Ritchie, dirigeait ici une entreprise qui se consacrait, dans les années 1830, à l’exploitation agricole et forestière, à la pêche et au trappage. Le camp de l’île Grog sur le chemin Riverside a appartenu pendant de nombreuses années au célèbre éditeur de journaux américain, Joseph Pulitzer.

Les Loyalistes de la Nouvelle-Angleterre d’origine écossaise furent les premiers colons non autochtones de Matapédia. Leur héritage survit dans les noms locaux courants : Adams, Bell, McDavid, Moores, Mowat, Wheeler pour n’en nommer que
quelques-uns. Runnymede, une toute petite exploitation agricole située à sept kilomètres de Matapédia, à l’extrémité du chemin Riverside, marque l’emplacement où s’est établie la première colonie de Loyalistes écossais vers 1807. Leurs descendants y exploitent toujours la terre.

Restigouche RiverUn certain nombre de petites communautés isolées surgirent dans les années 1800. La plupart ont disparu, cependant une église baptiste solitaire marque l’emplacement de l’établissement Moores sur le chemin Riverside; une école de pionniers se dresse toujours à Deeside, nommé ainsi en l’honneur de la maison ancestrale du colon loyaliste John Mowat sur la rivière Dee, en Écosse.

Matapédia abrite aussi des descendants de familles irlandaises qui ont commencé à s’établir dans la région vers 1850. Surplombant le confluent des rivières, l’exceptionnelle église catholique en bois blanc de style gothique (1902) rend hommage à leurs ancêtres qui, en 1870, se sont joints à leurs voisins français dans le but de fonder la paroisse de Saint-Laurent-de-Matapédia.

LE CENTRE D’INTERPRÉTATION HISTORIQUE DU CHEMIN KEMPT
La création d’un lien entre la baie des Chaleurs et la seigneurie de Métis sur le fleuve Saint-Laurent fut une prouesse d’une telle importance pour les colons de la péninsule gaspésienne que les amateurs de patrimoine local soulignent encore ce fait par un petit musée, ouvert seulement en été, et une boutique d’artisanat situés à l’entrée sud du chemin historique.

Les désaccords entre les États-Unis et la Grande-Bretagne à propos des frontières subsistèrent pendant de nombreuses années à la suite de la Révolution américaine et de la Guerre de 1812-1814. La menace de nouvelles hostilités en incita plusieurs à demander la mise en place de nouvelles voies de communications entre le fleuve Saint-Laurent et la côte de l’Atlantique. Le pionnier de Ristigouche, Isaac Mann, connaissait les anciens sentiers micmacs et très tôt, il devint un partisan d’une route terrestre entre Ristigouche et Métis.

Favorisée par le gouverneur général du Canada James Kempt, cette ancienne route militaire fut arpentée et défrichée entre 1830 et 1833.

Logé dans l’église unie St. John à l’ouest du village micmac de Listigouch, le centre d’interprétation relate l’histoire du chemin grâce à une exposition mettant en vedette d’anciens levés et des objets remontant au début des années 1800.

Centre d’interprétation historique
6, chemin Kempt
Ristigouche-Partie-Sud-Est

Le lieu historique national du Canada
DE LA BATAILLE-DE-LA-RISTIGOUCHE

Mis en valeur par Parcs Canada, ce musée fascinant commémore le site de la dernière bataille navale qui opposa la France et l’Angleterre pour le contrôle du Canada, un épisode central de la Guerre de Sept Ans.

French frigate, Le MarchaultAu cours de l’été 1760, une escadre de trois vaisseaux de guerre britannique pénètre dans la rivière à la poursuite d’un convoi de navires marchands français, faisant partie d’une expédition de secours partie de Bordeaux dans l’espoir de reprendre Québec. Les bateaux français, plus petits, ne font pas le poids face aux vaisseaux de guerre britanniques et le 8 juillet 1760, après plusieurs jours de combats, la marine royale remporte la victoire. La défaite de la Ristigouche a scellé le sort de la Nouvelle-France. Coupé de toute aide, le dernier bastion canadien de la France, Montréal, se rend à la Grande-Bretagne, au mois de septembre suivant.

L’exposition de Ristigouche présente une variété d’objets trouvés dans la frégate française naufragée, Le Machault, dont des parties ont été retrouvées par des plongeurs au début des années 1970. Les visiteurs s’émerveilleront devant l’énorme gouvernail en chêne et une section de la coque, en partie reconstruite. Une présentation audiovisuelle retrace les événements de la bataille et son importance historique pour le Québec et l’Amérique du Nord.

Centre d’interprétation
(418) 788-5676
Sans frais : 1-800-463-6769
Site Web : parcscanada.gc.ca/Ristigouche

PARC NATIONAL DE MIGUASHA
Site du patrimoine mondial de l’UNESCO

Il y a des centaines de millions d’années, alors que le continent nord-américain faisait partie de l’Europe du Nord et était rapproché de l’équateur, les eaux de la baie des Chaleurs à l’embouchure de la Ristigouche formaient une lagune tropicale peu profonde. Un grand nombre d’anciennes plantes et de créatures marines vivaient ici et lorsqu’elles moururent, quelques-unes laissèrent leur empreinte dans le fond boueux de la rivière. Avec le temps, cette boue s’est solidifiée et est devenue de la roche, laissant ainsi aux scientifiques un exceptionnel témoignage fossilifère du passé.

miguasha cliffsDepuis leur découverte sur les falaises de Miguasha près du village de Nouvelle à la fin des années 1880, les dépôts de fossiles ont beaucoup révélé sur l’évolution de la vie sur notre planète. Ces dépôts contiennent quelques-uns des spécimens les mieux conservés au monde d’anciens poissons, tels les sarcoptérygiens, les ancêtres des premiers animaux à quatre pattes. Les plaques le long d’un sentier pédestre situé sur une falaise relatent cette évolution.

L’exposition intérieure, à la fois un laboratoire et un musée d’histoire naturelle, illustre de manière admirable les méthodes de la paléontologie.

Déclaré un site du patrimoine mondial en 1999, le parc de Miguasha est géré par l’administration des parcs provinciaux, la SÉPAQ.

Parc national de Miguasha
270, route Miguasha Ouest, Nouvelle (Québec)
Téléphone : (418) 794-2475

Le Réseau du patrimoine anglophone du Québec a préparé ce guide. La série des Circuits patrimoniaux bénéficie de subventions de Patrimoine Canada et de Développement économique Canada. Des contraintes d’espace empêchent la mention de tous les sites. Nous remercions de leur aide Ken Annett, Ph.D., auteur de Gaspé of Yesterday, et Gertrude Fitzgerald.

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